Missio Belgique a récemment eu la joie d’accueillir Monseigneur Peter Chifukwa, évêque au Malawi, qu’accompagnait le père Marc Dewallef (missionnaires d’Afrique). Lors de cette visite fraternelle, Mgr. Chifukwa nous a accordé un entretien chaleureux au cours duquel il a principalement évoqué l’Église du Malawi, ses réalités et défis actuels et à venir. Un entretien mutuellement enrichissant dont nous reprenons ici la substance.
Pouvez-vous brièvement vous présenter à nos lecteurs ?
Je suis Monseigneur Peter Chifukwa, évêque du diocèse de Dedza au Malawi, depuis 4 ans. Avant ma nomination comme évêque, j’étais recteur du Petit Séminaire Saint Kisito de Dedza, depuis 2011.
Pourquoi êtes-vous en Belgique ?
Je suis en Belgique pour la première fois, en vue de faire connaissance avec votre Église, rencontrer les Pères Missionnaires d’Afrique (les pères blancs) qui sont également en mission chez nous au Malawi. J’ai donc saisi cette occasion pour rendre visite à Missio Belgique, afin de savoir ce que vous faites concrètement, et ce que nous pouvons faire ensemble pour nous soutenir dans notre mission commune d’annoncer la Bonne Nouvelle aux quatre coins du monde.
Pouvez-vous brièvement nous présenter l’Église du Malawi ?
Avec plaisir. Le Malawi compte quelque 20 millions d’habitants, dont une majorité de chrétiens (77,3%, chiffres de 2018) ainsi qu’une minorité musulmane en croissance (18%), qui subit également l’influence de mouvements extrémistes. Les catholiques sont prépondérants (17%), mais réunis ensemble, les protestants sont beaucoup plus nombreux.
Le Malawi compte actuellement 8 diocèses, et deux autres sont en cours de création. Nous avons en outre deux archidiocèses et 10 évêques au total.
Un mot sur l’impact social de l’Église au Malawi ?
La visite du pape Jean-Paul en 1989 au Malawi a créé une dynamique très positive dans l’impact social de l’Église. C’est ainsi qu’en 1994, les évêques du Malawi ont publié une lettre pastorale qui a marqué un véritable tournant dans la vie politique du pays. En critiquant ouvertement le régime en place et la corruption, et en appelant au multipartisme, elle a enclenché la dynamique démocratique dont le pays récolte désormais les fruits. Depuis lors, la parole de l’Église catholique compte, elle est très écoutée et attendue par la société. D’autre part et comme d’habitude, l’Église au Malawi reste très active dans les domaines de l’éducation, de la formation et de la santé, avec le soutien du gouvernement.
L’Église entretient donc de bonnes relations avec le pouvoir politique au Malawi ?
Il arrive qu’elles soient tendues, notamment lorsque nous ne partageons pas les mêmes points de vue sur certaines questions. Mais globalement, l’Église au Malawi entretient de bons rapports avec les autorités politiques. Dans le domaine de la santé comme dans celui de l’éducation, de manière générale, l’Église construit les bâtiments, l’infrastructure, et l’État prend en charge le personnel, excepté dans les établissements privés. C’est une très bonne collaboration que nous apprécions et promouvons.
Comment est organisée la formation du personnel de l’Église, et notamment des prêtres ?
Le personnel de l’Église est formé dans les institutions de formation locales, et au besoin à l’étranger. Pour ce qui est des prêtres en particulier, le Malawi compte deux Grands Séminaires. Dans le diocèse de Dedza dont je suis responsable, nous avons un philosophat et un théologat, où jadis venaient également se former de futurs prêtres zambiens.
Qu’en est-il des vocations ?
Nous avons suffisamment de vocations. Pour le diocèse de Dedza par exemple, nous avons 34 séminaristes, même s’il arrive, comme cette année, que nous n’ayons pas d’ordination sacerdotale. Le manque de moyens et d’espace nous contraint d’ailleurs à refuser des candidats au sacerdoce, ou à repousser leur entrée au Séminaire. Il y a également beaucoup de vocations religieuses, notamment chez les filles. Il y en a par contre beaucoup moins chez les garçons, ce qui explique qu’il y ait peu de congrégations masculines au Malawi.
Concrètement, sur le plan pastoral, comment est organisé votre diocèse?
Mon diocèse compte 19 paroisses principales, chacune d’elle étant au centre de plusieurs paroisses satellites dans un rayon de 15 km. Il existe également des cellules chrétiennes qui se réunissent ci et là. Le principe voudrait qu’il y ait deux prêtres par paroisse.
Sur le plan fonctionnel, nous vivons la synodalité de manière quasiment naturelle, c’est pourquoi nous avions eu un peu de mal au début à cerner les enjeux du synode sur la synodalité pour notre Église au Malawi.
Comment vivez-vous au Malawi cette année consacrée au jubilé de l’espérance ?
Pour célébrer cette année du jubilé de l’Espérance, de nombreuses activités sont organisées au Malawi dans différents diocèses et pour différentes catégorises de personnes, les enfants, les jeunes, les femmes et les hommes. Juste un exemple, la semaine passée, nous avons organisé au Malawi le premier congrès eucharistique. Cet évènement a rassemblé de nombreux chrétiens et chrétiennes ; il a désormais vocation à se perpétuer au fil des années.
Un dernier mot ?
Je voudrais sincèrement vous remercier pour cet accueil très chaleureux et fraternel. Je vous prie de saluer toute l’équipe de Missio Belgique et formule le vœu que nous nous soutenions mutuellement, dans la prière et la solidarité concrète, face aux défis respectifs auxquels nos Églises sont confrontées.
Emmanuel Babissagana